Réforme des retraites : pourquoi la tension pourrait encore monter d'un cran dans les manifestations

  • Ce jeudi, des affrontements avec les forces de l'ordre se sont généralisées en France
    Ce jeudi, des affrontements avec les forces de l'ordre se sont généralisées en France MAXPPP - YOAN VALAT
Publié le , mis à jour

Ce neuvième jour de mobilisation contre la réforme des retraites a vu des tensions et des heurts apparaître dans plusieurs villes de France. Au fil des jours, face à une absence d'écoute de la part du gouvernement, une partie de la rue traduit peu à peu son agacement face à cette situation par des actes plus radicaux, voire violents. L'analyse des manifestations de ce jeudi 23 mars.
 

Ce jeudi 23 mars marque certainement un nouveau record en termes de participation des Français aux rassemblements, neuf en tout, organisés officiellement contre la réforme des retraites. Et ce quand bien même la messe semble dite, après l'utilisation du 49.3 par le gouvernement pour faire adopter sans vote ce projet de loi, puis le rejet ce lundi 20 mars de la motion de censure contre ce même gouvernement. Un projet de loi que les Français sont de plus en plus nombreux à juger "injuste" et inefficace".

Heurts et blocages se généralisent

Mais en marge de ce nouveau record (3,5 millions de personnes selon les syndicats, 1,08 personnes selon l'Intérieur), ou du moins à égalité avec la précédente mobilisation record du 7 mars (3,5 millions de personnes selon les syndicats, 1,08 personnes selon l'Intérieur), c'est bien "l'intensité" de ces manifestations qui est à retenir. Dans plusieurs villes partout en France, des heurts, débordements et tensions sont apparus, mais aussi des blocages d'axes routiers, de ronds-points, d'établissements scolaires et autres bâtiments (raffineries, dépots...), y compris dans les petites villes. C'est sans parler des grèves dans les transports, ou des coupures d'électricité qui deviennent récurrentes.

Macron, comme une huile sur le feu ?

Et l'intervention télévisée d'Emmanuel Macron  la veille de ce nouveau rassemblement n'a en rien apaisé la déception des opposants à la réforme des retraites, bien au contraire : 61% des Français pensent même que son discours va "provoquer plus de colère" en France, en jugeant le chef de l'Etat "autoritaire" et "arrogant", voire "inquiétant".

Sûr de sa méthode mais aussi pour offrir les garanties d'une France qui bosse au monde économique comme aux marchés financiers, Emmanuel Macron reste "inflexible" sur la réforme des retraites, qu'il considère comme actée, alors que les syndicats continuent à croire dur comme fer au retrait de ce projet de loi. Lui et son gouvernement espère que l'adoption sans discussion de cette réforme tant décriée va lasser peu à peu les Français, comme le détaille BFMTV : ceux-ci sont en effet moins nombreux, maintenant, à défendre ces mobilisations (il restent 65% tout de même à y être favorables), voire à les voir se durcir (44%).

Partout des interpellations, incendies, dégradations, blessures...

Et le ton de ces mobilisations se durcit déjà, ce qui n'est plus l'apanage de Paris ou d'une petite autre poignée de ville : ce jeudi 23 mars, longue est la liste des villes où des affrontements ont éclaté. A Paris, Rennes, Lorient, Bordeaux, Nantes, Frontignan, Rouen Bayonne, Toulouse (liste non exhaustive, on pourrait ajouter Angers, Lille, Bourg-en-Bresse... etc), les gaz lacrymogènes et les canons à eau des forces de l'ordre sont entrés en action, des affrontements ont eu lieu, des policiers et gendarmes (441) et des manifestants blessés, des centaines d'interpellation (457)s, des dégradations et incendies commis non seulement sur des commerces ou du mobilier urbain, mais à présent sur des bâtiments symbolisant le pouvoir (une sous-préfecture, un commissariat, un tribunal, un hôtel de ville)... A chaque fois, les "black blocs" sont bien sûr pointés du doigt par les deux bords, mais tous ces heurts qui se généralisent sont-ils seulement imputables à ces ultras radicaux ?

A cela s'ajoute, depuis l'adoption de la réforme des retraites par le 49.3 le jeudi 16 mars, des manifestations spontanées, non autorisées et le plus souvent violentes, qui se "déclarent" à la tombée de la nuit. Ce mercredi 22 mars, le ministère de l'Intérieur en avait dénombré quelque 1 200 en une semaine, à travers toute la France. 

Jusqu'à quand ?

A l'heure où ce jeudi soir, l'intersyndicale a appelé à une nouvelle mobilisation nationale pour le mardi 28 mars, quelle sera la teneur et la texture de ce nouvel appel à manifester ? Si les responsables politiques et les syndicats appellent à la "non violence", ils appellent aussi à "bloquer le pays par tous les moyens". "On ne lâche rien", lâchent manif après manif les syndicats. Quels seront ces nouveaux moyens qui seront mis en place le 28 mars ?  Pour l'intersyndicale, "la responsabilité de cette situation explosive incombe au gouvernement". Et jusqu'à quand ces mobilisations peuvent-elles durer, jusqu'à l'application du texte, que le président de la République voudrait pour "avant la fin de l'année" ? Ou jusqu'à ce que les forces de la rue s'étiolent au fil du temps ?

Seulement, la mobilisation contre la réforme des retraites ne semble pas prête à la prendre, sa retraite. Mieux (ou pire), elle est dans la force de l'âge, et semble prête, en revanche, à revêtir toutes formes d'audace.

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